Établissement du prix d’une proposition SaaS pour grande entreprise

Établissement du prix d’une proposition SaaS pour grande entreprise

par Dan Freedman

Conseil d’iNovia no 613 en matière de Growth Hacking

Unsplash / Jonathan Simcoe

Établir le prix d’une proposition SaaS (logiciel en tant que service) pour grande entreprise relève davantage de l’art que de la science, du moins au début lorsqu’il n’est pas clair combien les clients sont prêts à payer. L’établissement du prix vient probablement au deuxième rang au chapitre de l’importance et de la subjectivité après la sélection du nom de l’entreprise ou du produit. Alors, comment un entrepreneur doit-il aborder la question de la tarification? Cet article se penchera sur quelques facteurs qui, à défaut de finaliser un prix exact, peuvent au moins vous aider à définir une échelle de tarification à partir de laquelle un prix peut être établi.

Rubriques de ce blogue:

  • L’approche à éviter : « Abonnez-vous, c’est pas cher »
  • Quel prix demandé pour que votre entreprise soit attrayante?
  • Cela procure quelle valeur pour les clients?
  • Combien ça coûte de faire modifier un produit pour un client?
  • Quel est le coût marginal de distribution?
  • Prix variables pour répondre aux besoins d’une variété de clients
  • Prix de base, plus options de prix différenciés
  • Concurrents directs et indirects
  • Offrir au client le produit gratuitement pour éviter qu’il achète chez le concurrent
  • Demandez au client
  • Finalement, un mot sur le désespoir

L’approche à éviter : « Abonnez-vous, c’est pas cher »

Il s’agit d’une approche tellement courante chez les entrepreneurs technologiques que je me dois de la mettre au sommet du palmarès. La pire façon d’aborder la question de la tarification est en disant : « Hum… offrons le produit à un prix si bas que les entreprises l’achèteront sans vraiment y penser. » C’est une approche bien tentante, car vous pourriez croire qu’en proposant un prix bas, vous éviterez les longs cycles de vente et vous n’aurez pas à développer beaucoup de compétences en vente que vous (en tant que fondateur d’une entreprise de technologie) n’avez peut-être pas encore acquises. Mais en réalité, ce ne sont pas les prix bas qui convainquent les grandes entreprises d’acheter. Elles recherchent une solution à leur problème. Alors, si votre proposition ne fait pas cela, personne n’y consacrera le temps qu’il faut pour l’évaluer, et ce, assez longtemps pour s’inquiéter du coût. Et, inversement, si votre produit parvient à résoudre un problème important, le prix est susceptible d’être le moindre de vos soucis dans vos efforts à conclure une vente. La différenciation de prix s’avèrera un facteur seulement dans une situation où il existe des concurrents directs offrant un produit très similaire au vôtre. Devant une telle situation, une question s’impose : suis-je dans le bon secteur d’activité? Il est difficile de faire de l’argent dans un secteur où le prix du produit doit se rapprocher du coût de production de ce produit, une conséquence inévitable lorsque le prix est le seul élément différenciateur.

Quel prix demandé pour que votre entreprise soit attrayante?

Puisque le coût marginal de distribution de la plupart des produits technologiques (notamment les offres SaaS) n’est nullement relié au prix de vente, la plupart des entrepreneurs en haute technologie disposent d’une flexibilité quasi totale pour fixer leur prix. Cependant, n’oubliez pas que vous exploitez une réelle entreprise qui comporte de réels coûts. Une méthode qui devrait être utilisée par tous les entrepreneurs pour décider du prix est de se demander à quoi le prix doit ressembler pour que l’entreprise soit attrayante. Pour mieux comprendre ce que cela signifie, il suffit d’examiner les indicateurs de rendement clés (IRC) d’entreprises œuvrant dans des industries similaires et d’inclure des sociétés ouvertes d’envergure dans le lot. La vente de solutions SaaS aux grandes entreprises? Pourquoi pas. Allez consulter le Form 10-K de la SEC pour voir les sociétés de logiciels d’entreprise les plus prospères au monde, telles que Microsoft et Oracle, ou des entreprises SaaS, comme ZenDesk et SalesForce. Vous y trouverez des gammes de pourcentages de revenus consacrés à la recherche et au développement, aux ventes et marketing, au soutien, aux frais généraux et administratifs, pour ne nommer que ceux-là.

Ces chiffres peuvent être appliqués à votre propre entreprise pour arriver à un chiffre implicite, soit le montant que vos propres revenus doivent atteindre pour obtenir des ratios similaires. Si vous allez dépenser cinq millions de dollars en ventes et marketing, peut-être que le montant de revenus implicite nécessaire pour que vous ayez l’apparence d’un joueur d’élite parmi les sociétés de logiciels est de 15 millions de dollars. Si vous prévoyez pour l’année à venir faire cinq grosses ventes, 10 ventes moyennes et 100 petites ventes, vous pourriez envisager les prix suivants : un million de dollars pour chaque grosse vente, 500 000 $ pour chaque moyenne et 50 000 $ pour chaque petite.

Remarque : ce type d’analyse ne donne absolument aucune indication de combien un client est prêt à payer pour votre produit. Il se peut que votre offre ne vaille pas le montant de revenus que propose cette analyse, mais cette dernière vous aura appris quelque chose d’utile : il faut que vous développiez un produit qui a plus de valeur! Malheureusement, on voit cela chez bon nombre d’entreprises qui se sont données corps et âme au développement de leur produit, mais pour qui au final le produit n’a pas suffisamment de valeur pour soutenir le personnel nécessaire pour l’améliorer. Avant de déployer tous ces efforts, prenez d’abord le temps de faire ce genre d’analyse pour déterminer quelle valeur doit avoir votre produit pour que votre entreprise soit attrayante. Si les résultats obtenus ne vous satisfont pas, changez votre produit jusqu’à ce que vous soyez satisfait, ou changez votre modèle d’affaires de sorte que l’argent généré par votre produit puisse soutenir votre entreprise adéquatement … Ce n’est qu’à ce moment-là que vous devriez passer à l’étape du développement.

Résumé de cette approche : Analysez vos coûts et revenus en les comparant aux IRC d’autres entreprises pour définir le « prix crucial » pour votre entreprise. Utilisez cette analyse, de concert avec les autres mécanismes proposés dans cet article, pour déterminer si votre produit peut soutenir votre entreprise de la manière voulue, afin d’obtenir le respect que vous méritez sur le marché.

Cela procure quelle valeur pour les clients?

Cette méthode d’établissement des prix est possiblement la plus difficile à quantifier, pour deux raisons. Premièrement, il faut presque pouvoir lire dans les pensées pour découvrir ce que les clients veulent et à quel point ils le veulent. C’est difficile à faire, mais pire encore, les clients n’accorderont pas tous la même valeur à votre produit ou service. Pour certains, la valeur que représente votre produit est énorme. Pour d’autres, il procure peu ou pas de valeur. Et pour compliquer les choses encore plus, les entrepreneurs technologiques ont tendance à sous-estimer leur propre expertise (ou celle de leur entreprise). Ils finissent par remettre en question la valeur que peut procurer leur produit aux clients, car c’est si simple — j’ai bâti les tripes de base en un week-end.

Tout de même, il faut se rappeler qu’un produit évolutif en est un qui est vendu à plusieurs clients sans avoir subi de grandes modifications. Le défi, c’est de trouver le « juste équilibre » en matière de tarification qui permet à plusieurs acheteurs de voir la proposition de valeur devant eux et qui les convainc de rédiger le chèque. Pour trouver ce juste équilibre, pensez à un groupe représentatif de clients potentiels et évaluez leurs solutions alternatives — ce qu’ils feront s’ils n’achètent pas votre produit.

Ne sautez pas aux conclusions faciles en pensant que si le client n’achète pas votre produit, il se procurera un produit similaire d’un concurrent. En fait, cette façon de penser fait fi du concurrent le plus puissant, le plus redoutable et le plus fréquent de tous : le statu quo. Pensez d’abord aux autres possibilités qui existent pour le client en examinant ce qu’il arriverait s’il décidait de ne pas acheter de nouveau produit et de continuer à faire ce qu’il fait actuellement. Certes, votre produit pourrait aider le client à faire un grand bond en avant, mais il génère de l’argent en faisant ce qu’il fait actuellement, sans votre produit. Pourriez-vous lui faire économiser encore plus? Possiblement, mais pour lui, il y a toujours un risque (pour son entreprise et pour sa carrière) qu’un pépin survienne lors du déploiement de votre produit, une fois que votre produit est intégré à sa chaîne de revenus.

Il n’est certainement pas facile pour un gestionnaire, pour qui sa propre carrière est une priorité, de prendre un risque avec le produit d’une entreprise en démarrage, à moins que le gestionnaire (ou l’entreprise) ne soit désespéré. En fait, ce point mérite qu’on s’y attarde quelques instants : les clients potentiels qui ne sont pas désespérés sont plus enclins à maintenir le statu quo qu’à tenter leur chance avec un nouveau produit. Alors, pour réussir en tant que jeune entreprise, il faut trouver les clients désespérés puisque ce sont eux qui formeront ultimement votre clientèle. Ceux qui ne le sont pas vont attendre que l’un de leurs principaux fournisseurs (Cisco, Microsoft, Oracle, etc.) improvise (ou acquière) un produit similaire, afin d’éviter le risque d’échec.

Bien que cela puisse sembler déprimant, il y a toutefois un côté positif à tout cela. Les clients en désespoir sont prêts à payer le gros prix pour des solutions, parce que… bien… ils sont désespérés. Ils font peut-être face à une situation où ils doivent se conformer à une nouvelle réglementation gouvernementale (source bien connue de grand désespoir) ou ils sont en train de perdre du terrain face à l’un de leurs concurrents, ou bien ils réalisent que leur propre marché est au bord du gouffre, ce qui les oblige à se tourner vers un autre. Quelle que soit la raison, tout client désespéré s’avère un bon client potentiel pour une entreprise en démarrage. Nous devons exiger d’eux un prix élevé, sinon il ne sera pas possible de générer suffisamment de revenus pour garder en vie nos propres entreprises. Pour les clients désespérés, il s’agit d’un raisonnement à appliquer, si jamais ils demandent pourquoi les prix sont si élevés. « Ah oui, bien, sans exiger de tels prix, notre entreprise ne pourrait pas survivre à l’intérieur des normes de la concurrence de notre catégorie. Ces prix sont alors nécessaires pour continuer à vous offrir un service hors pair. »

Combien ça coûte de faire modifier un produit pour un client?

Au fil de ma carrière, il y a eu quelques clients clés avec qui je désirais désespérément conclure une vente, surtout durant la période de commercialisation du produit, où les histoires de réussite se font rares. Mais fréquemment, ces clients exigent que le produit soit adapté à leurs besoins avant qu’il ne soit déployé à grande échelle. C’est sûr, au bout du compte, votre produit sera suffisamment équipé et flexible pour satisfaire la plupart des exigences du client en matière de personnalisation. Mais dans les premiers temps, quand le produit fonctionne à peine, des modifications seront inévitables. Et ça, ça coûte combien?

Règle générale, la personnalisation de votre produit devrait générer des profits, pas engendrer des coûts. Elle devrait également procurer des marges raisonnables pour votre entreprise. Si ce n’est pas le cas, même si le montant représentant vos revenus est élevé, votre modèle d’affaires s’écroulera sous les dépenses excessives. Toute extrapolation de données recueillies pendant les premiers mois ou les premières années de votre modèle d’affaires indiquera que votre entreprise est peu rentable ou marginale, et qu’elle est peu propice au financement. Mais en faisant de la personnalisation de produit une activité de consultation rentable et génératrice de revenus, vous aiderez votre modèle d’affaires plutôt que l’endommager. Même s’il est possible d’avancer l’argument que cette activité de consultation devra finir par être cédée ou vendue à un intégrateur de systèmes, un centre de profit sera considéré comme facilement vendable.

Alors, si vous dépensez 100 000 $ en coûts de recherche et développement pour adapter un produit aux besoins d’un client, vous pourriez considérer facturer des frais de 200 000 $ ou (encore mieux) de 300 000 $. Si cela vous semble excessif, rappelez-vous que votre client est probablement une grande entreprise qui dispose d’un centre de coûts pour frais généraux considérables associé à chaque projet. Le client est probablement habitué à recevoir des soumissions de sociétés comme IBM et Oracle pour des projets de personnalisation. Croyez-moi, quelle que soit votre décision en matière de tarification, votre montant sera plus bas que celui que ces sociétés proposent couramment. Le point que je tente de faire valoir ici, c’est que si vous êtes en mesure de payer pour les personnalisations avec les frais que vous exigez et qu’il vous en reste pour subventionner vos activités régulières de développement, vous avez fait une bonne affaire. C’est une technique qui fonctionne bien avec les clients désespérés. Mais pour ce qui est des clients non désespérés, bien, ils sont difficiles à conquérir par de jeunes entreprises, de toute façon. Alors, misez sur le désespoir, et foncez!

Quel est le coût marginal de distribution?

La distribution d’un produit ou service à un client engendre toujours des frais quelconques. Que ce soient des frais d’exploitation d’un site Web, des frais de formation pour assurer l’obtention de valeur pour le client, ou des frais d’installation et de configuration, ça coûte toujours quelque chose. Pour que votre entreprise soit viable, le prix du produit à vendre doit couvrir au moins ses coûts de fabrication et de distribution. Il est donc dans l’intérêt de tout fondateur ou PDG de bien comprendre ces coûts. Mais, bien sûr, les revenus générés doivent également couvrir les coûts de développement, les frais de soutien, les frais de vente et marketing, les frais généraux de gestion, le loyer, les impôts et toute autre dépense. Finalement, une fois que l’entreprise a atteint la maturité, la vente de ses produits devra également réaliser des profits, bien que cela soit difficile quand tout l’argent qui entre est redirigé vers les activités de croissance.

En général, le fait de comprendre comment les coûts globaux de l’entreprise peuvent être amortis avec chaque vente aide à fixer un prix de base qui justifie ces ventes. Si vous vendez à un prix qui est inférieur au coût marginal de distribution, votre entreprise ne sera jamais rentable, peu importe son niveau de croissance. Si vous vendez à un prix qui est près de ce coût marginal, votre entreprise devra soutenir une croissance importante pendant des années pour atteindre la rentabilité. Le mieux, c’est de vendre à un prix bien supérieur au coût marginal, afin d’atteindre la rentabilité rapidement, avec une croissance modeste.

Prix variables pour répondre aux besoins d’une variété de clients

La valeur de votre produit peut représenter 1 000 $ par poste pour un client et 10 000 $ par poste pour un autre. Il serait bien dommage de laisser une portion de cet argent sur la table de négociation. Il devient alors nécessaire d’avoir différents prix pour différents clients. Parfois, il suffit d’offrir différentes versions du produit, comme des versions « légère », « régulière » et « super ». Mais d’autres fois, les mêmes fonctionnalités peuvent procurer une valeur complètement différente à différents clients.

L’offre de rabais est souvent employée pour combler l’écart entre un prix élevé et la faible valeur fournie. Sachant fort bien que les clients discutent des prix proposés ensemble, il faut toujours être prêt à justifier de façon défendable pourquoi un rabais considérable est offert à une entreprise et non à une autre. De telles justifications comprennent :

  • Valeur stratégique
  • Engagement hâtif
  • Participation aux « tests bêta »
  • Déplacement d’un concurrent direct
  • « Changement de politique — nous n’offrons plus ce prix aujourd’hui »
  • Établissement d’un nouveau segment vertical
  • Offre d’être un client de référence
  • Participation à une étude de cas

Au bout du compte, ce qui importe, c’est de trouver pour chaque client le point auquel l’obtention de la plus grande source de revenus continue est possible, tout en procurant de la valeur au client.

Prix de base, plus options de prix différenciés

Comme je l’ai mentionné plus haut, parfois la valeur que procure un produit varie grandement d’un client à l’autre, même sur une base par unité ou par poste. Cependant, pour les clients pour qui le produit procure une valeur significative, il est impératif de récupérer une portion de cette valeur sous forme de paiements de licence ou de frais d’abonnement. Disons que 80 % des clients ne peuvent justifier payer plus de 250 $/mois pour le produit, et que les 20 % qui restent sont en mesure de débourser 1 000 $/mois, montant qui correspond à votre « juste équilibre ». En appliquant ce calcul mathématique, pour chaque tranche de 100 clients, 80 d’entre eux débourseraient 250 $ chacun pour un total de 20 000 $, tandis que 20 clients payeraient 1 000 $ chacun, pour un total de 20 000 $. En effet, les 20 % fournissent la moitié des revenus, mais on ne voudrait certainement pas laisser l’autre moitié de côté en offrant uniquement un produit à 1 000 $/mois. De même, si on exigeait le prix de 250 $/mois chacun à l’ensemble des clients, on obtiendrait que 25 000 $ sur les 40 000 $ disponibles, laissant trop d’argent sur la table.

Le fait d’avoir un modèle de prix différenciés signifie que tout le monde peut bénéficier du produit à un prix de base, mais les « super » utilisateurs pourront obtenir ce dont ils ont vraiment besoin grâce à des fonctions supplémentaires optionnelles facturées séparément. Il est difficile de viser juste dans l’établissement de ces niveaux de prix, car personne ne vous dira « Ah, si vous fixez le prix de telle façon, 80 % achèteront les fonctions de base et 20 % achèteront la totale à quatre fois le prix. » Plutôt, les gens vont dire : « Alors, qu’est-ce que vous pensez que le prix devrait être? » Voici ce que je recommande : dans votre calcul, tenez compte des concurrents, du statu quo et des autres propositions SaaS (même celles qui ne sont pas similaires) que vos clients ont tendance à accepter. À l’aide de toutes ces sources, entamez un processus d’essais et d’erreurs avec vos propres clients pour déterminer ce qui fonctionne bien.

Concurrents directs

Si vous êtes assez chanceux (ou malchanceux) d’avoir des concurrents qui proposent des produits qui sont très similaires aux vôtres (c’est ce qu’on appelle des concurrents directs), il est fort probable que l’achat de produits se fasse en fonction du prix ou, du moins, sur la base d’une idée préconçue de ce qu’est un « prix raisonnable ». Si vous exigez un prix qui est le double de ce que proposent vos concurrents, vous devez avoir les raisons qui le justifient, sinon la vente ne vous reviendra pas. Si vous n’aimez pas les prix proposés par vos concurrents, seuls les éléments différenciateurs qui sont importants pour vos clients pourront justifier votre demande d’un prix plus élevé. Par exemple, si votre produit est « meilleur » du fait qu’il est deux fois plus rapide, mais que le client ne perçoit pas le produit du concurrent comme étant « lent », ce dernier ne payera pas plus pour un produit plus rapide. Les clients n’achètent pas le meilleur produit, ils achètent celui qui répond à leurs besoins au prix le plus bas. Peu importe qu’il soit laid ou inesthétique. L’incompréhension de cette motivation joue bien des tours aux entrepreneurs technologiques.

Concurrents indirects

Ah, le nombre de fois que j’ai entendu un entrepreneur dire : « Nous sommes la première et la seule entreprise de XYZ sur le marché », comme si cela était une raison justifiable de facturer n’importe quoi pour un produit. Ce qui échappe à bon nombre d’entrepreneurs, c’est que tous leurs clients potentiels s’en tirent très bien sans l’utilisation de leur produit XYZ. Autrement dit, même dans un marché sans concurrent direct, les clients disposent d’un processus existant qui leur permet de générer de l’argent. Sinon, ils ne seraient pas de bons clients, n’ayant pas d’argent pour acheter de produits. Alors, habituellement, le plus redoutable des concurrents qui soit, quand vous tentez de vendre un nouveau produit, est le statu quo, c’est-à-dire ce que le client fait actuellement sans l’utilisation de votre solution.

Une fois que ce concept de base est bien compris, il faut se poser la question suivante : quel est le coût pour le client de continuer à faire ce qu’il fait actuellement au lieu d’utiliser mon produit? Cela correspond essentiellement à la valeur du nouveau produit. Si le prix est supérieur au coût du statu quo, il ne sera pas perçu comme ayant une bonne valeur. Et si le prix est inférieur, il pourrait être perçu comme ayant peut-être une bonne valeur, s’il inspire confiance à tous les égards. Enfin, il est très important de comprendre les coûts et les risques associés au statu quo, surtout quand il s’agit de produits « uniques » sur le marché.

Bien sûr, il se pourrait que le client tire un avantage de l’acquisition de votre produit, un avantage qu’il n’aurait pas s’il maintenait le statu quo. Par exemple, votre produit pourrait lui faire économiser temps et argent, ou bien lui faire découvrir de nouvelles occasions. Quoique tout cela soit valable, il est difficile d’éduquer les clients sur la façon dont ils peuvent changer la nature de leur entreprise, et ce, en grande partie en raison d’un fait très simple : bien que nous, les technologues, comprenons la technologie mieux que les clients, ces derniers, en tant qu’exploitants d’affaires, comprennent leurs activités commerciales mieux que tout fournisseur de technologie. Nous pouvons bien tenter de les éduquer, mais les nombreuses années d’expérience qu’ils ont accumulées contribuent à leur résistance au changement. L’idéal, c’est de convaincre les clients qu’ils peuvent réaliser des économies, un argument qu’ils ne réfutent jamais.

Offrir au client le produit gratuitement pour éviter qu’il achète chez le concurrent

Aucun entrepreneur ne veut entendre qu’un client potentiel a décidé de ne pas acheter son produit. Mais pire encore, c’est d’apprendre que ce client a décidé d’acheter le produit d’un concurrent. C’est pire parce que, non seulement cette décision affaiblit l’entreprise de l’entrepreneur, elle renforce aussi celle du concurrent. J’encourage toujours les entrepreneurs à faire tout en leur pouvoir pour empêcher qu’un client achète un produit d’un concurrent direct, même s’ils doivent littéralement donner leur produit pour empêcher la vente à un concurrent. Donner gratuitement? Oui, mais ça n’a pas besoin d’être une entente permanente. Vous pourriez dire quelque chose du genre : « Oh, vous avez décidé d’acheter le produit de notre concurrent. Je suis désolé d’entendre cela, mais que diriez-vous d’utiliser notre produit gratuitement pendant un an (ou toute autre période de temps qui convient), afin d’avoir une meilleure idée de sa valeur pour vous? »

Vous vous demandez peut-être c’est quoi le rapport avec le prix? Bien, parfois, il n’est pas évident quel prix demander pour assurer une vente. Mais une fois qu’un client a choisi le produit d’un concurrent, il est vraiment difficile de lui faire changer d’idée et de regagner sa confiance. Il est préférable d’empêcher que l’entreprise concurrente devienne plus forte, même si cela fait en sorte que la vôtre ne fasse pas d’argent. Vous aurez toujours la possibilité de jouer avec le prix, les fonctions, etc. à l’avenir, et une fois que le client est conquis, vous n’aurez pas à travailler si fort pour « le regagner ».

Unsplash / Jonathan Simcoe

Demandez au client

Parfois, il est juste très difficile de fixer un prix pour un produit. Dans certains cas, surtout avec les tout premiers clients, l’approche qui convient le mieux est de simplement demander au client à quel prix le produit constituerait une bonne valeur pour lui. Il va sans dire, l’honnêteté du client entre en ligne de compte ici, mais j’ai constaté au fil des années que la plupart des clients au sein de grandes entreprises sont des personnes plutôt honorables. Rappelez-vous aussi que le prix représente seulement une portion du risque auquel le client s’expose. En grande partie, il risque de ne plus avoir accès au produit en raison de l’échec de l’entreprise en démarrage. Croyez-le ou non, la plupart des clients des grandes entreprises préfèrent débourser plus d’argent tout de suite pour assurer votre survie durant leur séjour au sein de l’entreprise et minimiser le risque sur leur carrière. Aimeraient-ils obtenir « quelque chose pour rien »? Bien sûr, mais pas si cela met leur carrière en péril.

Finalement, un mot sur le désespoir

Les seuls clients susceptibles de prendre le risque d’intégrer votre produit aux activités critiques de leur entreprise sont ceux qui sont désespérés. Ceux qui ne le sont pas vont plutôt attendre qu’un gros fournisseur propose un produit similaire. Pourquoi cela est-il important? Parce que les clients désespérés tolèrent mieux le paiement de prix plus élevés. Et puisque les seuls clients à qui vous vendrez au début sont fort probablement ceux qui sont désespérés, ou ceux qui considèrent les nouvelles technologies comme étant un « loisir » ou ayant un « intérêt particulier » pour l’entreprise, le prix qu’ils seront prêts à payer sera plus élevé que ce que vous pourriez penser. La morale de l’histoire est : n’ayez pas peur de demander un prix élevé. Les clients les plus enclins à acheter votre produit sont assez désespérés pour consentir à un tel prix.

Voir aussi :